l’homme/emblème a trouver son maître : l’artiste même. LA FELICITE CLAUSTREE par Marcel Blanchot :
Ces images élaborées par la plasticienne LUNa ont valeur d’icône. Sont-elles des visions de grâce ou de disgrâce ? La question réside dans cette ambiguïté à double volet.
La passion avec laquelle l’artiste a mis au monde ces photographies nous fait d’ailleurs penser à une autre passion : celle du Christ outragé.
L’extase de la flagellation, le plaisir coupable, la soumission en vertu d’idéaux bien plus grands que l’être tendent vers une relecture de l’histoire baroque, ces temps où les artistes reproduisaient les actes du Divin dans une volupté tortueuse et sublime. Ici, la vocation de cette œuvre est palpable et propose une visio intellectualis : la cruauté béate dans l’adoration céleste. Le corps bafoué, l’androgynie perceptible dans la silhouette, les détails où l’on sent le poil s’hérisser évoquent un peu plus loin certains modèles de prières peintes alla fresca par Fra Angelico pour les moines dominicains des cellules du couvent San Marco. L’abaissement ici n’est pas un mal, un pécher ou une perversion, c’est une dévotion, un assujettissement aux lois de son propre corps autant qu’aux volontés de l’artiste. Se plier devant l’exigence plastique et mimer la rédemption du péché, voilà la norme ! Le modèle anonyme ne peut rien faire, il est castré dans son mouvement, prisonnier d’une image puissante, résolument contemporaine : l’homme/emblème a trouver son maître : l’artiste même.